Nous sommes le Jeudi 26
février 2015 à Lyon, le ciel est gris et le temps pluvieux mais ce
n’est pas grave car je sais que je vais pouvoir assister à une
conférence qui me tient énormément à cœur. C’est une théfu
qui m’a parlé de cette conférence juste un jour avant (on peut
le dire j’ai eu de la chance, donc je la remercie énormément).
Il est 18h30 et j’arrive
à la mairie du 2ème arrondissement de Lyon, la mairie et
les locaux qui l’entourent sont magnifiques. Il faut l’avouer
j’étais un peu stressé d’aller à cette conférence car je ne
savais pas du tout à quoi m’attendre, je savais juste que j’y
verrais l’une des femmes qui m’a fait le plus rêver ces
dernières années avec ses voyages et son histoire.
La porte de la mairie
poussée, je me fais interpeller par une ThéGirl qui me reconnait
par mes vidéos, dès le premier instant elle semble vraiment
sympathique, j’ai peu Blablathé avec elle mais je sais que si on
avait pris plus de temps on aurait beaucoup plus échangé sur le
monde et la magie du thé.
Après avec l’amie qui
m’a accompagné nous sommes allés nous asseoir dans cette salle
qui était magnifiquement décorée, il y avait des signes asiatiques
peints sur de la toile pour cacher la froideur naturelle d’une
salle de mairie. Il y avait des tables nappées de rouge rappelant le
drapeau chinois.
En ouvrant un peu plus
les yeux une fois assis, je me dis « c’est elle »,
Nadia Bécaud, j’avais l’impression d’être un petit gamin face
à une star de la pop. Quand je la regardais, je voyais une femme
sereine qui avait un visage neutre, elle était vêtue d’un habit
traditionnel chinois, ce qui continua à me faire voyager.
Le maire fut présent un
court instant pour faire les présentations puis ce fut l’adjoint
au maire qui prit la place par la suite. Pendant que ces hommes
« politiques » parlèrent l’assistante de Nadia Bécaud
nous servit un magnifique thé Blanc, « un thé de bienvenu ».
Et maintenant tous les éléments sont là pour voyager pendant plus
d’une heure.
Pour commencer elle nous
dit que le thé est le développement d’un art et que surtout il a
une dimension culturelle particulière. Il faut en effet savoir que
le thé, au départ, n’est pas consommé comme une boisson mais
comme un médicament (on sait maintenant qu’il possède des
propriétés anti-cancer) et il était considéré comme offrande aux
divinités. Par la suite le thé fut introduit dans la cuisine, on le
retrouva dans beaucoup de plat du quotidien (une sorte de légume
amer sauté selon ses mots). Puis c’est Lu Yu (733-804) qui fut le
premier à décider d’enlever tous les aliments autour du thé et
d’en faire une préparation unique. Il est considéré comme le
premier maître de thé et c’est grâce à lui que le thé fut
élevé au rang d’un art ancestral.
Ensuite, elle évoque
avec légèreté et brièveté l’histoire du thé au travers des
différentes dynasties : Tang, puis Song.
Le thé fait partie des
offrandes et des rituels bouddhistes et comme le dit Nadia Bécaud il
existe une harmonie naturelle entre les bouddhistes et le thé. Pour
eux il a un intérêt spécifique, le thé les aide à avoir une
certaine clarté d’esprit, à apprécier le véritable sens de la
vie. Elle nous explique que de nos jours c’est toujours le cas, que
le thé a toujours une place très importante dans le quotidien
bouddhiste.
Saviez-vous que le thé
n’était pas destiné à tout le monde au départ ? Le thé
était (et reste) un breuvage d’exception. C’est dans la montagne
de Mending (province de Sichuan) que le premier jardin de thé a été
créé et il était destiné seulement à l’empereur. Toutefois, ce
dernier avait une manière bien particulière de le consommer :
il l’offrait au ciel, et on nomme maintenant ce jardin « Le
jardin des esprits » (il continue par ailleurs à produire
d’excellents thés).
En nous racontant toutes
ces histoires Nadia Bécaud a réussi à instaurer une ambiance
mystique, j’avais l’impression d’être dans une bulle. Hors du
temps.
Elle nous parle ensuite
de BODHIDHARMA qui est le fondateur en chine de l’école de Chan,
il est le descendant direct de Bouddha (je vous avoue que je n’ai
pas pris énormément de notes ici, trop absorbé par ce qu’elle
nous racontait et ralenti par ces noms compliqués).
Je retiens par la suite
qu’entre le 9ème et le 10ème siècles il y
eut 3 voyages vers le Japon et commença alors l’exportation de
plusieurs plans de théières vers ce pays. Le thé y fût alors
développé avec l’importance qu’on lui connaît aujourd’hui.
Elle
nous apprend par la suite que le thé ne pousse, en Chine, que dans
le Sud. Dans le Nord du pays le temps est trop aride pour permettre
le bon développement du thé.
Dans cette Chine du Sud
on trouve trois des quatre montagnes sacrées dont le Mont Jiuhua et
le Mont Putuo où est récolté un célèbre thé Wu Long (le Tie
Guan Yin dont le nom est directement emprunté au bouddhisme).
Nadia Bécaud nous parle
d’un récent événement, datant du printemps 1987 : le temple
FAMEN qui s’est effondré 6 années auparavant se voit être le
théâtre d’une somptueuse découverte lors de sa reconstruction
puisque ce n’est pas moins de 2000 objets liés à la cérémonie
de thé qui seront retrouvés, fabriqués en or et en d’autres
matériaux luxueux et précieux. C’est à ce moment-là que l’on
se dit que le monde du thé est vraiment quelque chose d’historique
et que, loin d’être réductible à une simple boisson, c’est un
art de vivre, un art de pensé.
Voici un court proverbe
enseigné à Mme Bécaud lors de son premier voyage en Chine :
« Thé et bouddhisme
ne sont qu’un »
Par la suite elle nous évoque les
vertus du thé, qui sont exprimées par les cérémonies :
- Harmonie : le thé nous apporte « nature, paix, santé et éveil » Le thé nous apporte un certain équilibre selon les bouddhistes.
- Respect : on doit être humble avec ceux qui nous entourent.
- Silence : ici c’est le silence intérieur, le bruit mais également le silence faisant partie de la vie.
- Sérénité : va se développer par la pratique des 3 premières vertus.
Dans une suite logique elle nous parle
des cérémonies de thé, qui sont très nombreuses et j’insiste
vraiment sur le « très ». Elles vont se différencier
selon l’époque, la classe sociale et l’endroit où l’on se
trouve (entre cette dernière phrase et la suivante il y eu une pause
de 3 heures, j’ai fait des recherches dans mes livres et sur
internet sur les cérémonies et j’en ai référencé pas moins
d’une trentaine et il y en a encore bien d’autres …. J’ai été
en totale fascination sur certaines).
Suite à ça Nadia Bécaud finit son
intervention sur le thème de la voie du thé et maintenant nous
sommes passés aux questions. Certaines personnes (surtout une) pose
des questions vraiment étranges (elle aurait dû tourner sa langue 7
fois dans sa bouche avant de parler) : une dame qui ne comprend
pas la différence entre un grand cru et un thé en sachet,
insistante et déterminée face à Nadia Bécaud, ce qui fût je dois
l’avouer assez drôle.
A travers ces questions-réponses nous
apprenons qu’en France il est vraiment très rare de trouver un bon
matcha sans mettre le prix fort et surtout un matcha pas conçu pour
la cuisine.
Aussi un autre point important surgit :
celui de la conservation du thé. Elle conseille fortement que l’on
place le thé au frigo (pour garder sa fraicheur, surtout les grands
crus) mais surtout elle insiste sur le fait que vers 6 mois le thé
perd énormément de ses vertus et de sa qualité gustative.
Le point qu’elle
souligne et qui me semble vraiment important c’est que le thé se
marie avec l’eau, et que la qualité de cette dernière est
primordiale. Il faut éviter (voire oublier) l’eau du robinet. Donc
les Théfu il faut investir soit dans les bouteilles d’eau où dans
une super filtreuse, moi j’ai une Brita et je peux le dire que je
vois clairement la différence.
Pendant que je me délectais de cet
échange avec tous les membres et la maitresse de conférence, cette
dernière en vient à donner sa définition d’un bon thé (écoutez
bien, même si vous le savez surement je pense) :
- Les meilleurs récoltes sont au printemps, donc il faut privilégier les thés de printemps (pour les thés verts et blancs) et les grands crus ne sont récoltés qu’une fois par an.
- Le thé sera de meilleure qualité s’il provient des hauteurs, donc il faut privilégier les thés de montagnes.
- La proportion de bourgeons est importante (ATTENTION pas pour tous les thés cependant, le Lu An Gua Pian et ses grandes feuilles, par exemple, n’obéit pas à cette règle) : les bourgeons sont riches en huiles essentielles, ce qui joue beaucoup sur l’arôme.
Plus le temps et les questions passent
et plus notre hôte se sent à l’aise, jusqu’à nous dévoiler
quelques anecdotes sur elle. Ainsi, elle a commencé à boire du thé
principalement parce qu’elle ne digérait pas le lait. Depuis, ses
amis savent qu’elle a toujours une bouilloire sur le feu (elle nous
raconte ça avec un grand sourire, l’ambiance est chaleureuse et
amusante). Au tout départ de son aventure dans le thé elle est
partie à Darjeeling et elle a vécu chez des planteurs mais elle a
été frustrée de leur cérémonie, elle nous dit qu’ils
pratiquaient en effet le TEA- CEREMONY c’est à dire à l’anglaise
mais pour elle ce ne fût pas intéressant (j’entends encore son
rire lorsqu’elle nous raconte ça). Ensuite elle est partie en
Chine, berceau de sa passion devenue au fil du temps débordante,
puis créa les magasins Sha Yuan. Sa volonté de transmission plus
forte que tout, elle prendra sa retraite pour se concentrer dans
l’institut qu’elle a créé en parallèle de son commerce.
Une fois nos échanges terminés elle
conclut en nous proposant la démonstration d’une cérémonie de
thé, celle du GONGFU Cha, l’une des plus connues. C’est une
cérémonie qui a doit être faite avec des gestes très précis et
elle demande une grande concentration. Quand elle commence à la
pratiquer, un silence religieux se fait dans la salle ! Plus un
bruit, ou presque, le seul bruit que l’on pouvait entendre était
celui de l’eau coulant dans les diverses tasses. Un moment magique
et surtout hors du temps.
La conférence finit après plus de
deux heures. Des connaissances culturelles, un échange très
enrichissant.
Vous avez donc compris les théfu que
je me suis régalé pendant cette conférence. J’espère avoir fait
de mon mieux en vous transmettant ces informations et j’espère que
vous avez voyagé autant que moi dans ce monde magique qu’est le
thé.
Vous avez des questions ? Alors je
vous écoute.
Bonne tasse de thé à vous ;)
Alex Before
merci Alex d'avoir partagé avec nous cette conférence.
RépondreSupprimerHahaha! "une théfu" et "une ThéGirl"... ;)
RépondreSupprimerChouettes souvenirs.
Merci.